L’Enquête Sociale Européenne permet d’étudier le rapport des résidents en France au changement climatique, tout en le comparant à celui des autres Européens. En y associant les résultats d’une enquête de la Commission européenne de 2009 sur le rapport au changement climatique, nous pouvons montrer l’évolution dans l’attitude des résidents en France par rapport aux autres pays européens sur cet enjeu crucial. Le résultat de cette comparaison montre en 2016 une sensibilité plus importante, en France, à la responsabilité individuelle dans la lutte contre le changement climatique.
Le changement climatique, s’il préoccupe les scientifiques depuis le XIXe siècle (Kandel 2010), connaît depuis quelques années un sursaut de popularité au sein de l’opinion publique. En France, de nombreuses mesures de politique publique, d’éducation, ou de politique internationale ont pu avoir une influence sur la manière dont les citoyens perçoivent le changement climatique et leur rôle pour y remédier. L’édition 8 de l’Enquête Sociale Européenne (en 2016) comporte un module interrogeant spécifiquement les attitudes des répondants vis-à-vis du changement climatique. En comparant les réponses des résidents en France à celles d’autres pays d’Europe depuis 2009, nous avons tenté d’observer l’évolution de l’attitude des résidents de l’Hexagone face au changement climatique.
En 2009, la Commission européenne a commandé un rapport Eurobaromètre dédié à « l’attitude des Européens par rapport au réchauffement climatique ». Ce rapport se fonde sur un questionnaire très court (une dizaine de questions) dédié à la perception du changement climatique en Europe. Parmi les 27 pays membres concernés par ce questionnaire, 12 ont également participé à ESS 8 (Estonie, Irlande, Pologne, Suède, République tchèque, Royaume-Uni, Pays-Bas, Autriche, Belgique, Slovénie, France et Allemagne). La méthode employée ici est comparative et relative : les deux questionnaires étant assez différents, il est uniquement possible de comparer les réponses entre pays en 2009 puis en 2016, sans analyser l’évolution au sein d’un pays entre 2009 et 2016.
Deux types de questions sont présentes dans les deux enquêtes. Le premier concerne l’opinion sur le changement climatique, à savoir s’il s’agit d’un problème important, si ce problème apparaît inquiétant au répondant. Le second type de question concerne les actions des citoyens pour réduire leur consommation et lutter contre le changement climatique.

Tableau 1 : questions posées dans l’enquête de 2009 et dans l’enquête de 2016 par thème
Concernant la perception du changement climatique, on remarque entre 2009 et 2016 une relative stabilité de la place de la France à l’échelle européenne. Les habitants du pays sont en effet en 2016 parmi les plus inquiets concernant l’importance du changement climatique.

Figure 1 : Pourcentage de gens ayant répondu «Très préoccupé» ou «Extrêmement préoccupé» à la question “Dans quelle mesure êtes-vous préoccupé par le changement climatique?”, par pays.
Source : ESS8 (2016)
Cette place confirme celle de l’enquête de 2009, où ils tenaient le deuxième rang, en pourcentage de personnes ayant déclaré que le changement climatique est un « problème très sérieux ».
Pour ce qui est de l’implication personnelle contre le changement climatique et des actions menées, on remarque une évolution relative importante du comportement des résidents en France : le pays passe de la moyenne basse des pays européens en 2009 à la 2e place en 2016. En 2009, la France était neuvième dans le classement, en termes de pourcentage de personnes ayant répondu « D’accord » à la question « Vous avez personnellement pris des actions pour contribuer à la lutte contre le changement climatique ».
En 2016 par contre, les habitants de la France, au niveau individuel, semblent penser qu’ils effectuent souvent des actions pour lutter contre le changement climatique, même de manière détournée.

Figure 2 : Pourcentage de personnes ayant répondu «Souvent» à «Toujours» à la question “Au quotidien, à quelle fréquence faites-vous des gestes pour réduire votre consommation d’énergie ?”, par pays.
Source : ESS8 (2016)
Le questionnaire ESS 8 dispose d’une variable qui pourrait aider à comprendre l’articulation entre une forte conscience du problème posé par le changement climatique et l’impression d’agir afin de lutter contre : la perception de la responsabilité individuelle. En moyenne, les habitants de la France ont en effet des scores plus élevés que les autres Européens sur l’échelle visant à mesurer le sentiment de « devoir personnel » dans la lutte contre le changement climatique.

Figure 3 : Moyenne des réponses à la question “À quel point estimez-vous qu’il est de votre devoir personnel d’essayer de lutter contre le changement climatique ?” sur une échelle de 0 à 10, par pays.
Source : ESS8 (2016)
Pour conclure, il est possible que la tenue des événements internationaux comme la COP 21 à Paris en décembre 2015 ait mis en lumière l’enjeu du changement climatique. Ces événements, qui ont été accompagnés d’une campagne de sensibilisation importante quelques mois avant la passation de l’enquête ESS 8, ont pu jouer un rôle non négligeable dans l’attitude des résidents français par rapport au changement climatique, accompagnés peut-être des politiques publiques mises en place pour lutter contre le changement climatique. Reste à savoir cependant s’il s’agit d’une évolution de long-terme, ou d’une sensibilisation passagère…
Bibliographie
- European Parliament and European Commission, Special Eurobarometer 313 / Wave 71.1 – TNS Opinion & Social : Europeans’ attitudes towards climate change, Report : January – February 2009,
- Kandel, Robert. « Introduction », Le changement climatique. Presses Universitaires de France, 2010, pp. 5-12.
- European Social Survey (2017). ESS Round 8 (2016/2017) Technical Report. London: ESS ERIC
